Face à la hausse des coûts, quelles marges de manœuvre pour les collectivités en 2022 ?

Mis à jour le vendredi 22 juillet 2022 14:37

Les collectivités ont terminé l’année 2021 et l’ensemble du quinquennat avec des indicateurs financiers globalement positifs et en amélioration. Toutefois, la hausse des coûts qui touche notamment l’énergie et les matières premières pèse désormais dans les budgets. Afin de ne pas amputer l’investissement, les collectivités peuvent compter sur le dynamisme de certaines recettes et leur résilience financière pour absorber le choc.

Une hausse des coûts qui impacte les budgets locaux

Les collectivités locales sont impactées par le contexte inflationniste, renforcé depuis le déclenchement du conflit en Ukraine. Certaines seront cependant plus impactées que d’autres en raison d’une exposition plus forte à la hausse des coûts énergétiques. Les revalorisations salariales qui découlent de la hausse des prix pèseront également lourd dans les budgets locaux.
Flambée des prix de l’énergie

D’après Bercy, le poste « énergie et électricité » représente un coût de 2,6 Md€ pour les collectivités soit environ 1,5% de leurs dépenses de fonctionnement. Le poste « combustibles et carburants » s’élève quant à lui à 800 M€ soit moins de 0,5% des dépenses de fonctionnement. Pour ces deux postes, avec une hypothèse « centrale » de progression des coûts de +50% en 2022, le surcoût pour les collectivités serait de +1,7 Md€, soit une augmentation proche de 1% des dépenses totales de fonctionnement.

Vers une accélération sur les salaires ?

Pour s’aligner sur la hausse du SMIC (+ 2,65% au 1er mai 2022), le minimum de traitement dans la fonction publique est désormais porté à 1 649,48 € bruts mensuels. En rythme annuel, l’impact sur la masse salariale s’élèvera entre 0,16% et 0,31% pour un département, entre 0,18% et 0,26% pour une région et entre 0,30% et 0,48% pour une commune[1].

Le dégel du point d’indice devrait également intervenir à l’été. Une majoration de 1% de celui-ci correspond à environ 650 M€ et se traduirait donc par une progression de 0,91% de la masse salariale des collectivités.

Les collectivités conservent néanmoins des marges de manœuvre pour absorber le choc inflationniste

Des indicateurs financiers solides fin 2021

Les collectivités ont abordé l’année 2022 dans une situation financière globalement bonne, voire en amélioration par rapport au début du quinquennat. La plupart des grands indicateurs financiers affichent en effet une progression entre 2017 et 2021 malgré la crise de 2020.
 Des recettes attendues en hausse en 2022

Nette progression de la taxe foncière

La revalorisation forfaitaire des bases locatives sera de 3,4% pour les habitations et les industries, soit la plus forte progression depuis 1989. D’après Bercy, cette revalorisation forfaitaire entraînera un produit de taxe foncière supplémentaire de 1,6 Md€ pour les communes et EPCI et de plus de 280 M€ au titre de la Cotisation foncière des entreprises. Par ailleurs, pour 2022, 29% des villes et groupements de plus de 100 000 habitants ont augmenté leurs taux selon une récente étude du cabinet FSL. L’évolution moyenne s’établit à +1,9% soit la progression la plus importante depuis 2010.

Croissance attendue de la TVA

Les estimations demeurent encore peu précises en raison des incertitudes économiques et géopolitiques mais la reprise économique de 2021 aura un impact positif sur les recettes de TVA dont une fraction est désormais reversée aux régions, départements et EPCI. D’après Bercy, ces recettes devraient s’accroître de +5% à +6% cette année, ce qui représenterait pour les collectivités : +800 M€ pour les départements, +500 M€ pour les intercommunalités et Paris, +780 M€ pour les régions.

Maintien des droits de mutation (DMTO) des départements à un niveau élevé

En 2021, l’euphorie du marché immobilier, aussi bien en termes de nombre de transactions qu’en montant, a dopé les DMTO. La progression sur l’année atteint +24%, soit 3,2 Md€ supplémentaires par rapport à 2020. Sur la période janvier-avril 2022, la hausse atteint en effet +7,8% par rapport à 2021.

 
Une trésorerie record

La croissance de la trésorerie des collectivités et établissements publics locaux s’est en effet poursuivie jusqu’à la fin de l’année 2021.
 Fin décembre 2021, son niveau s’élève à un niveau record de 76 Md€, en hausse de +13% sur un an et de +24% sur deux ans. Un point haut semble toutefois avoir été atteint, la trésorerie stagnant depuis le début 2022.

 
Des taux d’intérêt favorables

Les collectivités bénéficient depuis plusieurs années de conditions de financement très favorables avec des taux d’intérêt faibles leur permettant de s’endetter à moindre coût pour financer leurs investissements.

D’après Finance active, le taux d’intérêt auquel les collectivités ont emprunté en 2021 s’établit en moyenne à 0,62%, en légère hausse de moins d’1/10ème de point par rapport à 2020 (0,56%). Dans la période d’inflation actuelle (+5,2% sur un an à fin mai selon l’INSEE), ceci correspond donc à un niveau de taux d’intérêt réel très largement négatif : dans ce contexte financier propice, l’usage de la dette s’avère un levier efficace pour financer des investissements de long terme.

 
En conclusion

Les finances locales avaient bien résisté à la crise Covid en 2020. L’optimisme du début d’année est cependant tempéré par le contexte inflationniste et le conflit en Ukraine. Toutefois, ces problématiques ne doivent pas conduire à un excès de prudence en matière d’investissement pour des collectivités qui conservent en effet des moyens d’action.Alors qu’un nouvel effort sur les dépenses de fonctionnement ou la suppression de la CVAE ont été évoqués, une attention particulière doit être portée au dynamisme des ressources des collectivités pour dégager de l’autofinancement et au dynamisme des ressources d’investissement (notamment dotations d’investissement). Le rôle contracyclique des collectivités est majeur pour faire face à une crise et elles devront aussi faire face à des besoins d’investissements massifs pour répondre aux enjeux de la transition écologique, réduire les émissions de gaz à effet de serre et garantir une indépendance plus forte en matière énergétique. Les collectivités sont en première ligne pour agir !

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